Le jargon du p'tit folkleux

La trompe marine

La "proposition XIII" d'Alain Mersenne dans son harmonie universelle explique la construction, les parties, la figure de la trompette marine, ainsi que la manière d'en jouer.



Encore que l'on puisse donner le nom de monocorde à cet instrument, néanmoins on l'appelle trompette marine, soit que les matelots l'aient inventée, ou qu'elle imite si parfaitement les sons, et les chants de la trompette ordinaire, qu'il n'y a quasi nul moyen de les distinguer les uns avec les autres. elle a encore plusieurs choses trés remarquables que j'expliquerai, après en avoir donné la construction. Or j 'en met ici deux figures différentes, dont celle de la main droite ACED représente sa forme ancienne, et celle qui est à gauche montre la nouvelle forme que l'on a trouvé plus commode et meilleure pour résonner. Je viens donc à la première, dont le col AB a les deux chevilles P0 pour bander les cordes Q et MN, laquelle est arrêtée par le morceau de bois F, qui est couché et collé tout plat contre la table CDN, que l'on peut faire de sapin ou de tel autre bois que l'on voudra, comme l'on fait celles des autres instruments. Mais ce morceau de bois sert seulement pour retenir la corde, que l'on passe par un petit trou jusque dans le corps de l'instrument, et puis on y fait un noeud au bout pour la faire tenir.


Quant au chevalet GH, il s'ôte aisément de dessous la corde quand on veut, et n'y a que sa jambe G qui porte fermement sur la table, car l'autre jambe touche légèrement le petit morceau carré de verre, d'ivoire ou de métal que l'on colle sur la table afin que cette jambe fasse de petits frémissements dessus lorsque l'on touche la corde d'un archet, dont je ne met pas ici la figure, parce qu'il n'est pas différent de celui des violes. Je montre la figure de la rose, quoiqu'elle ne soit pas nécessaire (c'est pourquoi je n'en ai point mis sur la seconde figure) ou que l'on n'y en puisse mettre deux ou trois autres. L'on met encore un petit bout d'ivoire, ou de corne au bout de la jambe H, afin qu'elle frappe le verre plus fort.

La seconde corde Q n'a pas besoin de verre, et réussit mieux que l'autre, comme Je dirai en expliquant la seconde figure. K signifie le chevalet, par dessus lequel elle passe pour aller trouver le trou qui suit après : quoiqu'il soit plus à propos de dire que le petit morceau de bois courbé L est le vrai chevalet, puisque le son de la corde commence à L.

Or j'ai mis cette seconde corde à la quinte de la première GN, parce qu'elle apporte de grandes variétés aux tons de cette trompette : les nombres qui vont de un jusqu'à onze, montrent ces sons plus remarquables, dont le premier se fait en touchant la corde à vide, et le 2, 3, 4, 5, etc... s'entendent quand on touche du pouce, ou de l'index aux endroits marqués par ces nombres.

Mais avant que d'expliquer tous ces tons, et la manière d'en jouer et de la toucher, je viens à la seconde figure PS dont le col montre ses trois côtés, afin de faire connaitre que l'on peut faire cette Trompette à trois côtés ou à trois tables ; dont chacune aura une corde semblable à la corde Z, qui pourra être plus courte en telle raison que l'on voudra, afin qu'elle fasse le son des Clairons, et de toutes sortes de trompettes : et pour lors le col doit être fait au tour, afin que l'on trouve de la place pour les trois chevilles. Le chevalet Y se voit en sa juste grandeur à la figure , dont l'entaillure ou la coche montre le lieu où la corde s'appuie : et le bout 6 est celui qui porte légèrement sur la table lorsque l'on presse la corde avec l'archet.

où il faut premièrement remarquer qu'il est fort difficile d'accomoder ce chevalet, afin qu'il tremble comme il faut, car pour peu que l'on y manque, son tremblement devient trop fort et désagréable, ou trop faible : de sorte que l'on est souvent plusieurs heures à trouver le point de perfection qu'il désire. secondement l'on use d'un petit morceau de bois que l'on ente dans une rainure faite sur l'autre chevalet x, lequel est collé sur la table, afin que le dit morceau serve d'un chevalet mobile pour être mu à droite ou à pauche jusqu'à ce que le chevalet Y se rencontre justement à l'endroit ou il tremble médiocrement pour contribuer avec le tremblement de la corde à faire le son de la trompette.